« Ton frère est un sacré connard. » dit Julie avec le sourire. Elle ne sait pas de quoi elle parle, comment elle peut se le permettre ? Ces Érudits pensent tout savoir, alors qu'ils ne maitrisent pas un traître mot qui file entre leurs lèvres. C'est perturbant, dérangeant, cette façon qu'ils ont de s'accaparer instantanément la connaissance des autres. Comme s'il suffisait de leur raconter une anecdote anodine pour qu'ils sachent déjà tout sur vous. La preuve. Il t'a suffit de lui raconter la plus banale des prises de bec entre un frère et une sœur pour qu'elle pense pouvoir affirmer que ton frère est un "sacré connard".
Le coup part tout seul. Et tout va si vite dans ta tête; tu n'es plus une Audacieuse. Tu ne peux pas frapper les gens comme ça. Tu n'as pas le droit de laisser ta violence garder le dessus. Ici, on baisse les poings et on frappe avec les mots. Tu es une Sincère. Ou presque. Tu as choisis d'en être une, malgré le résultat du Test qui te criait de rester avec tes proches. Il va falloir un temps d'adaptation. Heureusement, tu as le réflexe de lui attraper le bras avant qu'elle ne s'effondre par terre. Il y a un grand silence dans le dortoir des transfères Sincères. Ta tête se redresse lentement, comme si le moindre mouvement pouvait te tuer instantanément. Il ne reste que ceux n'étant pas encore allés manger au restaurant, et tu remercies le timing pour ça. Dès ton arrivée, on t'a fait comprendre que tes débordements seraient surveillés. Tu n'es plus une Audacieuse. Mieux valait se taire sur les résultats de ton test, car il est rare qu'on ne choisisse pas sa faction prédestinée, et les natifs Sincères auraient prit malin plaisir à te charrier à ce sujet. Ce qui t'aurai énervée.
Tu lâches Julie lorsqu'elle se redresse, abasourdie, le nez en sang. « Et si quelqu'un a quelque chose a dire, je suis toute ouïe ! » tu lances à l'intention des cinq autres personnes dans la pièce qui te fixent en silence. En silence. « Aller, je vous écoute ! C'est pas en la fermant que vous passerez l'initiation. » Un nouveau silence. A croire qu'ils auraient mieux fait de rester chez eux. « C'est bien. Continuez. C'est comme ça qu'on rejoint les Sans-Factions. » Et tu sors en claquant la porte, ignorant l'air ahuri de Julie sur son lit.
C'est la dernière ligne droite. Jusqu'ici tout s'est assez bien déroulé. Mais le plus dur reste à venir ; le serum de vérité. Bien qu'au fond, tu n'as pas peur de devoir y passer, ce n'est que du stress. Et tu préfères être ici bravement, que là-bas, à affronter lâchement tes peurs. +uc